kandai_suika: (dramaqueen)
Kandai ([personal profile] kandai_suika) wrote2022-11-12 01:57 pm

[ficlet] Danny Phantom: Béthanie

Titre : Béthanie
Auteur : [personal profile] kandai_suika
Fandom : Danny Phantom
Personnages/Couple : Vlad Masters.
Genre : Angst, Horreur.
Rating : PG-13
Disclaimer : Butch Hartman, Nickelodeon.
Prompt : Danny Phantom + Vlad Masters + Se transformer, changer pour [personal profile] allenkune .
 
Résumé : Ou comment Vlad perdit et regagna la vie.
 
Note : Écrit pour l'échange d'Halloween 2022.
Continuité : Pre-canon.
Taille : ~1,700 
 

Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ;
quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais.

Jean 11 : 25-26

Des années plus tard, il raconterait une tout autre version de l'incident à la presse. Dans celle-ci, il mentionnerait une ambulance fonçant dans les rues serpentines de la mégapole en catastrophe, l'admission aux urgences dans un maëlstrom de cris dignes de la dernière série B du moment, des appels d'amis en proie à la panique tandis qu'il se tordait de douleur sous l'effet de l'ecto-acné qui lui brûlait le visage aussi douloureusement que de l'acide.

La réalité était beaucoup moins mélodramatique, évidemment : il était venu dans sa propre voiture, ses mains cachant tant bien que mal les dégâts que l’acné avait causé sur sa peau. Le jeune homme avait été admis sous les grimaces et les coups d'œil inquiets du personnel hospitalier au service des urgences dermatologiques et le premier médecin qui avait daigné libérer quelques minutes de son temps pour le recevoir s'était empressé de sortir à toute vitesse du cabinet, avec la ferme intention d'appeler le reste de ses confrères pour obtenir un avis sur la pathologie toute singulière qui venait de se présenter à lui.

Peut-être cherchait-il à sauver la face en fabulant ainsi son accident ou peut-être cherchait-il tout simplement à se faire plaindre. Peu importait, au final : la seule personne dont il essayait d'attendrir le cœur était à l'époque plongée jusqu'aux oreilles dans des calculs de recalibration sur la machine défectueuse à l'origine du problème. Les uniques messages qu'il avait reçus de Madeline Baker – qui plus tard, prendrait le nom de Fenton – étaient co-signés par son l'insupportable bouffon à l'origine de tous ses maux et la simple vue de l’écriture de Jack Fenton donnait au blessé des poussées de boutons. Les vœux de prompts rétablissements étaient restés sans réponse, froissées et tassées au fond d'une corbeille dont elles ne ressortiraient que des années plus tard.

Ce que Vlad Masters ommettrait de mentionner, en revanche, ce fut l'état de confusion mêlé de panique qui s'était emparé de l'infirmière venue prendre ses paramètres vitaux et qui avait fini par bégayer, blême comme un linge, qu'elle n'entendait aucun rythme cardiaque ni aucun pouls battre dans les veines irradiées de son patient.


Cliniquement, Vlad Masters était un cas intéressant.

On n'aurait su dire s'il fallait l'appeler anomalie ou miraculé. Dès que l’on essayait de l’ausculter, les machines s’affolaient autour de lui. L'homme n'avait aucun rythme cardiaque détectable, même avec les appareils les plus à la pointe de la technologie. Aucune activité cérébrale sur l'encéphalogramme, bien qu'il soit capable de parler, de marcher et de se souvenir d'évènements très précis de sa vie passée. Aucune analyse sanguine concluante n'avait pu être réalisée non plus : c'était tout juste si les aiguilles qu'on lui avait planté dans le corps arrivaient à aspirer quelques gouttes d'un liquide verdâtre et épais, dont les tests mettaient toutes les ordinateurs en déroute.

Les médecins s'étaient succédé à son chevet, perplexes et effrayés tout à la fois. Chaque donnée recueillie soulevait davantage de questions que de réponses, chaque analyse poussait l'incrédulité au-delà des frontières de tout ce qui était connu. Si on se fiait au bip-bip incessants des machines et au déluge de chiffres affolés que vomissaient les rapports médicaux tous les matins, Vlad Masters aurait dû être un cadavre pourrissant dans une morgue et non le jeune homme au visage recouvert de boutons qui se tenait devant eux.

Et pourtant, il était là.

Inexorablement, indéniablement, inexplicablement vivant - et pour tout avouer, furieux de gâcher les meilleures années de sa jeunesse sur un lit d'hôpital à contempler chaque matin son visage défiguré par les calculs erronés de Jack Fenton.

Pendant sa convalescence, sa vie sociale déclina : les rares amis qu'il possédait s'étaient évaporés à la vue de son affliction et les rares contacts avec le monde extérieur étaient des coups de fil froids et impersonnels avec les actionnaires des différentes compagnies que lui avaient léguées son père. Vlad n'avait jamais porté beaucoup d'intérêt pour le monde des affaires jusqu'ici, préférant consacrer son cerveau brillant à la recherche scientifique ; son rêve de gosse lui paraissait bien futile, désormais, et il n'était pas certain de pouvoir le reprendre un jour. Aucun des traitements pris pour soigner les poussées d'ecto-acné qui lui défiguraient le visage n'avait réellement d'impact, si ce n'était une diminution diffuse de l'inflammation.

Et puis, un jour, tout bascula nouveau.


Il ne l'avait pas fait exprès.

Il s'était levé comme à son habitude, avait contemplé le soleil se lever depuis la chambre de la clinique privée qu'il occupait, son regard se perdant tristement sur les courbes du paysage tandis que ses pensées plongeaient dans une spirale de frustration. Pendant une brève seconde, les rayons de l'aurore lui avaient renvoyé un reflet presque déformé de son horrible visage - ses yeux électriques, les grumeaux luisants qui lui constellaient les joues, le blanc immaculé de ses cheveux autrefois noirs... Son poing était parti tout seul, comme une arrière-pensée, frapper d'un coup rageur cette image horripilante de ce qu'il était devenu : une bête de foire, un rat de laboratoire bon à enfermer et à examiner sous des microscopes. Vlad était loin d'être une performance en athlétisme mais la puissance de la colère qu'il avait placé dans ce geste presque anodin aurait suffi à fendre la vitre. Il aurait pu fracasser ses phalanges contre la matière froide, s'oublier dans la rage et la douleur d'avoir tout perdu, tout perdu à cause de JACK FENTON...

Sauf que sa main n'avait jamais touché le verre.

Elle était passée au travers.

Vlad cligna des yeux. Contempla sans dire un mot son poignet d'un bleu pâle et luisant briller de l'autre côté de la fenêtre comme si elle avait été faite d'air. Ou comme si elle n'avait jamais existé.

... Comme si Vlad lui-même avait cessé d'exister.

Sa bouche s'ouvrit sur un cri horrifié.


Les semaines qui suivirent comptèrent parmi les moments les plus difficiles qu'il ait eu à vivre.

Le jeune homme – était-il seulement encore un homme ? était-il seulement encore en vie ? – avait passé la plupart de ses journées recroquevillé dans un coin de sa chambre, en proie à une panique croissante alors que son corps se déréglait sans qu'il puisse y faire quoi que ce soit. Ses membres s'effritaient ou disparaissaient dans le vide pour ensuite réapparaître comme si de rien n'était, fonctionnels et vivaces comme autrefois ; le sol l'aspirait parfois jusqu'à la taille avant qu'il ne se rende compte qu'il était tout simplement en train de traverser la matière et que ses pieds. Il lui arrivait même d'exister dans les deux plans à la fois, entre le tangible et l'invisible, et plus d'une fois, son estomac avait protesté contre la nourriture qu'il ingérait, trop riche et dense pour alimenter un corps qui visiblement n'avait plus besoin d'autant de calories qu'avant.

Après plusieurs mois d'expériences horrifiantes et de déni, Vlad fut forcé d'admettre deux vérités.

La première, c'était que cet abruti de Jack Fenton avait eu raison. Il y avait bel et bien un monde au-delà de la compréhension des vivants, un état que l'humanité avait peut-être essayé de capturer et comprendre sans jamais croire réellement à son existence. Un monde peuplé de résidus manifestes de la conscience que l'on théorisait sous le vulgaire nom de "fantôme", dotés de pouvoirs qui dépassaient les limitations mêmes du réel.

La seconde...

C'est qu'il faisait désormais partie de ce monde, bien malgré lui.

Quoique Jack lui eût fait subir ce matin-là, dans le sous-sol du laboratoire de leur université, cela lui avait arraché son humanité pour en faire... quelque chose d'autre. De puissant. De terrifiant.

Ni tout à fait vivant, ni tout à fait mort.

Un hybride, entre l’humain et le fantôme, errant à la frontière des deux mondes.

Un monstre.

Vlad se garda bien d'en parler autour de lui, évidemment ; il n'était pas souhaitable que l'information tombe entre de mauvaises mains et il n'y avait personne dans son entourage à qui il aurait pu faire confiance pour conserver un pareil secret, de toute façon. Pour la presse, il se contenta de gloser sur l'expérience que fut sa convalescence solitaire, brodant sans vergogne sur la honte et l'humiliation procurée par la guérison lente de son ecto-acné. Le public était friand de ce genre de récits larmoyants - s'ils avaient pu comprendre la douleur confuse de voir son propre corps se dissoudre dans le néant de l'air ou l'horrifiante vision de son propre squelette translucide perçant sous la peau, ils auraient sans doute été moins indulgents.

Qu'importait, finalement. L'interview lui rapporta plusieurs milliers de dollars et des dizaines de lettres d'admiration de la part de ses anciens pairs, désireux de gratter un peu de renommée ou d’argent au passage. Il les jeta toutes sans les regarder.

Un bouquet de chèques bien garnis plus tard avait permis de faire disparaître le reste des données compromettantes : du passage de Vlad Masters en clinique, il ne resta bientôt qu'un maigre tissu de mensonges sur son ecto-acné et la guérison lente mais miraculeuse qui s'en était suivie. Aucun mot sur son rythme cardiaque absent, sur sa peau qui tirait de temps à autre sur le vert pâle, sur ses pieds que le sol semblait parfois avaler. Aucune mention du rouge qui colorait ses yeux dans le noir ou de ses doigts qui disparaissaient dans ses manches. Aucune remarque sur ses murmures persistants, ses cauchemars abondants et son obsession croissante pour le responsable de l'accident qui avait ruiné sa vie sociale pendant des années entières.

Années au cours desquelles Jack Fenton épousa Maddie Baker.


— Et voilà qui conclut notre interview sur le retour tant attendu de Monsieur Masters, le multimilliardaire le plus branché du moment ! Vlad, avant de nous quitter, auriez-vous un dernier mot pour nos invités ? Une dernière parole qui décrirait votre état d'esprit alors que vous faites votre grand retour sur la scène publique ?

Une toux discrète se fit entendre, suivie d'un petit rire affecté.

— Eh bien, ma chère Abigail, je dirais que me retrouver à nouveau au cœur de l'action me fait le plus grand bien. En vérité, on pourrait penser que je suis... un homme nouveau.

— C'est un nouveau départ pour les industries VladCo, alors ?

— C'est bien peu dire. J'ai prévu de voir grand, ma chère, et j'ai des projets que vous n'imagineriez pas, même dans vos rêves les plus fous. Ce n'est pas un départ, c'est une... renaissance. Non, je dirais même mieux… Une résurrection.


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