[fic] Par le feu (2)
Nov. 11th, 2011 07:02 pm![[personal profile]](https://www.dreamwidth.org/img/silk/identity/user.png)

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Warnings : mort de personnage, violence explicite
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« Mais je te pardonne à toi, Zuko. »
Katara
Katara l’avait vu tomber.
Elle avait vu la lumière mortelle sortir des mains d’Azula pour se diriger lentement vers elle et la seule certitude que c’était sa fin à elle, qu’elle ne s’en sortirait pas, prit le pas sur tout le reste, la laissant gelée sur place. Elle n’était pas un Maître du feu. Elle ne pouvait pas s’en sortir.
Elle allait mourir et elle ne pouvait penser à rien d’autre qu’à cet éclair bleuté qui fonçait sur elle. Elle aurait voulu fermer les yeux mais sa fierté subsistant, elle se fit violence pour les garder grand ouverts. Il n’était pas dit que Katara de la Tribu de l’eau du Pôle Sud avait fermé les yeux face à sa mort. Elle se serait battue jusqu’au bout.
Ou peut-être avait-elle eu trop peur pour oser bouger un muscle.
- NON !
Elle avait entendu son cri avant de voir la lumière exploser, se répandre en arcs et auréoles à quelques mètres d’elle – suffisamment pour qu’elle ne soit plus en danger mais cela, elle ne l’avait pas compris tout de suite. Elle avait senti la chaleur balayer son visage mais elle était supportable. Il n’y avait eu aucune douleur, cependant et cela était étrange – car c’était bien un éclair que la princesse avait envoyé vers elle et elle avait vu la douleur qu’une telle attaque causée à Aang après les horribles évènements de Ba Sing Se.
Puis, elle vit son corps, son corps à lui, tomber sur le sol et elle comprit.
Il s’était mis entre elle et Azula. Au mépris de lui-même, il s’était jeté sur la course de l’éclair et il l’avait entravée avec sa propre chair, trouvant encore assez d’énergie pour renvoyer la foudre dans le ciel au dernier moment.
Mais il était tombé sous l’attaque de la princesse. Un soubresaut électrique le fit rouler sur le dos et après quelques tremblements, son corps sembla se relaxer… pour ne plus faire aucun mouvement.
Ce fut à ce moment précis que le cerveau de Katara se décida à sortir de sa torpeur et ce fut aveuglée par la peur qu’elle se mit en marche pour atteindre la forme allongée dans la cendre, son nom sortant de ses lèvres à la fois comme un cri et une supplique.
- ZUKO !
Azula ne fit pas un mouvement pour l’empêcher de rejoindre le jeune homme. La princesse semblait vidée de toute énergie, un semi-sourire étrange aux lèvres, comme si elle attendait quelque chose. Katara ne lui jeta pas un regard, tout son être concentré sur le corps immobile de Zuko. Elle se jeta à genoux à son côté et souleva doucement sa tête, cherchant la jugulaire. Cherchant un battement de cœur. Elle le trouva trop rapide, erratique et alors qu’elle criait à Zuko de tenir bon, alors qu’elle plaçait l’eau salvatrice sur son cœur avec l’énergie du désespoir, à l’endroit où Azula l’avait frappé, le jeune Prince ouvrit les yeux.
Katara soupira profondément, soulagée de le voir esquisser un mouvement… mais le soulagement s’évanouit dès qu’elle leva les yeux pour rencontrer ceux ambrés, si dorés du jeune maître du feu.
Elle connaissait ce regard que lui jeta le jeune homme qu’elle essayait désespérément de sauver, c’était le regard d’un mourant. Elle comprit tout de suite qu’elle n’était pas prête de remporter ce combat – était-elle sûre de pouvoir gagner contre ce cœur qu’elle sentait battre de moins en moins vite, contre cette respiration si faible ?
- Non ! cria le maître de l’eau, furieuse et terrifiée à l’idée de le perdre, lui aussi – Tui et La qu’ils avaient déjà trop perdu dans cette guerre ! – redoublant d’énergie, concentrant tout ce qu’elle pouvait sur son pouvoir de guérison. Mais certains pouvoirs avaient leurs limites et elle éprouvait déjà celles du sien.
C’était le jour où la comète de Sozin passait, un jour pleinement dédié aux maîtres du feu et leur prédominance éphémère ne se faisait jamais autant ressentir. Elle sentait les veines de Zuko pulser de plus en plus faiblement sous ses mains, elle entendait presque les battements de son cœur ralentir alors qu’elle luttait contre le feu de la comète qui grondait sous ses doigts, qui repoussait par automatisme son élément contraire.
- Grands esprits, j’essaye de le sauver ! hurla Katara, de plus en plus frénétique, inconsciente du regard d’or toujours posé sur elle, tant elle était concentrée sur la lutte qu’elle menait, sur la vie de Zuko qu’elle sentait glisser doucement, tout doucement.
« Tu ne pourras pas. »
Mais bien sûr que si, elle le pouvait, merde ! A quoi cela aurait-il servi, que Zuko vienne affronter les démons de son passé, pour affronter sa dingue de sœur au profit de ce qui était juste, à quoi cela servait-il de lui avoir pardonné si c’était pour mourir ensuite ? A quoi cela servait-il de le perdre, lui, alors qu’ils venaient tout juste de gagner ? A quoi bon se battre pour trouver sa place, si c’était pour se faire éjecter si vite du plateau de Pai Sho ?
- Tu… Tu te trompes, Katara.
C’était lui qui avait parlé, avec une lenteur exagérée, preuve d’une difficulté évidente. Ses lèvres étaient grises, son regard voilé de douleur mais toujours lucide. Sa voix ne tremblait pas, ne reflétait aucune autre émotion que la douleur qui l’empêchait de former ses mots. Comme s’il s’attendait à mourir. Comme si la mort qui fondait sur lui n’avait aucune importance – mais c’était faux et pourquoi, par Tui, se trompait-elle ? C’était elle qui le sauvait, alors qu’il se taise et qu’il la laisse faire ou mieux, qu’il l’aide, qu’il le contienne son feu intérieur, qu’il la combatte cette influence de la comète qui était en train de l’empêcher de le soigner – laisse-moi te soigner, laisse-moi te sauver.
- Oh, mais tais-toi, siffla le Maître de l’Eau, dont les larmes coulaient librement et elle ignorait s’il s’agissait de colère ou de tristesse – sans doute un subtil mélange des deux.
Sans qu’elle y prête attention – et pourquoi est-ce que son pouls était aussi faible ?! – Zuko tordit ses lèvres en un sourire, un sourire triste comme ceux qu’il avait l’habitude de faire, et ouvrit à nouveau ses lèvres pour parler, dans un murmure rauque – peut-être qu’il ressentait l’urgence qui régnait dans l’air, peut-être que sous son sourire si pâle, il était effrayé lui aussi.
- J’suis désolé… Pas de ta faute, Katara.
- JE SAIS ! cria la concernée, qui laissa parler la colère mêlée d’horreur qu’elle ressentait, ses doigts plantés dans la chair brûlée. Je sais que c’est TA faute, c’est toi qui as décidé de te jeter devant ce stupide éclair, c’est toi qui as fait le malin en défiant celle folle tout seul. Je sais et je suis furieuse mais…
Les mots se perdirent dans sa gorge. Mais elle devait le sauver. Parce que la vie de cet imbécile était plus importante que la sienne, que le futur Seigneur du feu était plus précieux aux yeux du monde à venir qu’un simple Maître de l’eau de la Tribu du Pôle Sud. Et parce qu’elle ne voulait plus perdre personne. Elle avait déjà perdu sa mère, elle avait failli perdre son frère et son père tellement de fois auparavant… Et d’autres gens qui comptaient pour elle aussi… Mais perdre Zuko, alors qu’elle venait à peine de lui pardonner, alors qu’elle venait à peine d’essayer de le comprendre, comme lui avait fait pour elle…
Il était le seul à l’avoir jamais fait.
Sokka ne la comprenait pas et elle ne lui en voulait pas pour ça. Il avait vécu des épreuves difficiles de son côté et se battait avec ses propres démons seul, parce que c’était quelque chose qu’il devait faire seul. Elle savait qu’il tenait à elle plus que tout au monde et qu’il ferait n’importe quoi pour elle mais la comprendre était une entreprise trop vaste et risquait de mettre en péril son propre équilibre déjà fragile.
Toph non plus mais ce fait était partagé. Elles étaient trop différentes pour se comprendre réellement même si elles s’entendaient assez bien et qu’il leur arrivait de se soutenir dans les moments difficiles.
Aang ne la comprenait pas davantage. Il la jugeait en premier et elle faisait assez confiance à son jugement pour ne pas le remettre en question. Même si elle s’en sentait frustrée, de temps en temps. Mais Aang était l’Avatar, il devait composer avec un monde en guerre, des esprits parfois malveillants, des gens qui voulaient sa mort et une adolescence traîtresse. Alors, elle essayait de ne pas en rajouter avec ses problèmes. D’autant plus que c’était plus facile ainsi et personne n’en souffrait.
Du moins, elle le croyait.
Zuko avait toujours fait le premier pas vers elle, que ce soit à Ba Sing Se, ou pour se faire accepter dans leur groupe. Et contrairement à bien d’autres, Zuko n’essayait pas de lui soutirer des faveurs – d’après Sokka, il était toujours un peu miné par le fait d’avoir dû abandonner une fille qu’il aimait beaucoup – mais plutôt juste à vouloir se racheter une conduite. Il était aussi obsédé par la rédemption qu’Aang lui-même – pas étonnant qu’ils s’entendent aussi bien. Et quand elle lui avait craché sa haine au visage, il ne l’avait pas rejetée comme elle s’attendait à ce qu’il le fasse.
Il connaissait trop bien la haine pour lui accorder ça.
Et parce qu’il était passé par là, lui aussi, avait pris les armes opposées pour la combattre. Armé de son affection et sa capacité à se sentir concerné, il l’avait aidée à aller plus loin dans ses côtés obscurs qu’elle ne l’avait jamais été auparavant. Et quand elle s’était retrouvée face à l’assassin de sa mère… elle était sûre que si elle en avait eu la force, Zuko ne l’aurait pas empêché de le tuer. Pas parce qu’il jugeait que ce soit la meilleure solution mais tout simplement parce que c’était son combat, à elle, et que c’était à elle de prendre ses propres décisions. Il avait fait pour elle ce qu’Aang n’avait pas pu faire et elle lui avait pardonné, s’était libérée de toute cette haine qu’elle gardait contre lui.
Elle pensait lui rendre la pareille en le laissant se battre seul contre Azula.
Elle n’aurait pas dû. Cela allait lui coûter la vie. Haletante, concentrée sur sa tâche, elle ne pouvait que sentir la course du sang se ralentir progressivement, les battements du cœur devenir de plus en plus lents sous ses doigts…
C’était de sa faute, tout ce gâchis.
- Je suis désolé, répéta-t-il, du même ton qui lui avait supplié de lui pardonner quelques jours plus tôt.
- Je sais, fit Katara. Elle pleurait ouvertement à présent, et sa colère semblait s’estomper devant l’horreur de la situation. Zuko allait mourir et elle ne pouvait rien plus faire, ses efforts lui paraissaient ridicules sous la puissance du feu qui le consumait sous sa peau roussie. Mais il ne semblait pas l’entendre. Il ne semblait pas comprendre.
- Tu le diras ? Mon oncle, Aang, les autres… Tu leur diras ?
Katara hocha doucement la tête, incapable de faire quoi que ce soit d’autre, et Zuko sourit doucement, avec une tendresse qu’elle ne lui connaissait pas. Son cœur trembla un peu – pourquoi fallait-il que ce soit maintenant qu’elle remarque ce genre de choses ? – et elle se décida à le serrer contre lui. C’était elle, la figure maternelle du groupe, après tout… elle pouvait bien faire ça.
- Ca va aller, répéta-t-elle un peu perdue, plus pour elle que pour lui. Ca va aller…
Elle sentit ses muscles se tendre une ultime fois, avant la détente fatale, celle qui annonçait que la mort venait de le rappeler dans le monde des esprits. Avec des gestes mécaniques, Katara reposa le Prince de la nation du feu – son ami – sur le sol couvert de cendres et lui ferma les yeux, ses yeux autrefois si pleins d’énergie, désormais ouverts sur le néant.
Et la rage la reprit, plus violente que celle qui s’était emparée d’elle lorsqu’elle avait retrouvé l’assassin de sa mère. Zuko avait été assassiné et elle avait le pouvoir de le venger… Il était étrange qu’Azula n’ait pas encore fait le moindre mouvement mais ce n’était pas Katara qui s’en plaindrait.
Elle attaqua.
Elle voulait tuer, elle voulait venger cette mort inutile, elle voulait se donner l’illusion que tout n’était pas terminé, pas encore, que si elle versait le sang d’Azula, peut-être, peut-être que Zuko…
Azula cria, comme folle, et Katara cessa d’attaquer, honteuse mais pas moins en colère.
Tout était déjà fini. Zuko était mort. A quoi cela servirait-il de tuer cette fille qui semblait perdre tout doucement la raison ? Elle se contenta de restreindre ses mouvements et se retourna vers le corps détendu de Zuko. Il paraissait dormir paisiblement, sous le feu de la comète qui quittait lentement le ciel, et Katara se prit à souhaiter que ce soit le cas.
Mais cela ne le serait plus jamais.
Séchant ses larmes, elle prit le corps sans vie dans ses bras. Elle avait foi en Aang et attendait de ses nouvelles – de bonnes nouvelles, espérait-elle de tout son cœur. Mais l’heure n’était pas à l’attente. Il fallait qu’elle envoie un message à Iroh. Il fallait qu’elle lui dise, qu’elle ne soit pas seule à porter l’horreur de la mort sur les épaules. Aujourd’hui, ils avaient peut-être gagné mais il lui semblait qu’elle n’avait plus que ses yeux pour pleurer la perte d’un membre de leur « famille ».
Aujourd’hui était un jour de deuil et de larmes.
Demain, demain, ils fêteraient la victoire.